11 novembre 2020 - Hommage à tous les « Morts pour la France » Journée nationale de commémoration de la Victoire et de Paix
La cérémonie du 11 novembre a eu lieu cette année, devant le monument des morts au sein de notre cimetière, en présence de notre maire, Pascal Hamon, accompagné de Jean-Noël Barrot, député des Yvelines, et d’Anne Grignon, présidente de la CCHVC et maire de Lévis Saint-Nom, le Père Jean-Brice Callery, Jocelyne Bellon et plusieurs membres du Conseil Municipal.
Après un mot d’introduction par le maire, Jocelyne Bellon a lu un texte très émouvant extrait du livre « Pilote de guerre » par Antoine de Saint-Exupéry. Ensuite notre maire a lu l’hommage écrit par Geneviève Darrieussecq, ministre délégué auprès de la ministre des Armées, et a rendu hommage aux 20 soldats morts pour la France en 2020 et les 16 Milonais morts pour la France en 1914-1918 et 1939-1945. Vous avez peut-être entendu la Marseillaise résonner dans notre belle vallée pour conclure.
Nous étions, à regret, privés de votre présence, voici donc quelques photos et le texte lu par Jocelyne, pour partager avec vous cette belle cérémonie.
C’est comme si
texte lu par Jocelyne Bellon
"Je me sens découragé jusqu’à la moelle par ce délabrement universel. Mais comme il me paraît inutile de faire sauter, bientôt, l’un de mes moteurs, j’exerce contre la manette de gauche une nouvelle pesée. Dans mon dégoût, j’exagère l’effort. Puis j’abandonne. Cet effort m’a coûté une nouvelle pointe au cœur. Décidément l’homme n’est pas bâti pour faire de la culture physique à dix mille mètres d’altitude. Cette pointe est une douleur en sourdine, une sorte de conscience locale bizarrement réveillée dans la nuit des organes.
Les moteurs sauteront s’ils le veulent. Moi je m’efforce de respirer. Il me semble que je ne respirerais plus si je me laissais distraire. Je me souviens des soufflets d’autrefois à l’aide desquels on ranimait le feu. Je ranime mon feu. Je voudrais le décider à « prendre ».
Qu’ai-je abîmé d’irréparable ? A dix mille mètres un effort physique un peu rude peut entraîner un déchirement des muscles du cœur. C’est très fragile, un cœur. Ça doit servir longtemps. Il est absurde de le compromettre pour des travaux aussi grossiers. C’est comme si l’on brûlait des diamants pour cuire une pomme.
C’est comme si l’on brûlait tous les villages du Nord sans retarder par leur destruction, ne fût-ce que d’une demi-journée, l’avance allemande. Et cependant cette provision de villages, ces vieilles églises, ces vieilles maisons, et toute leur cargaison de souvenirs, et leurs beaux parquets de noyer verni, et le beau linge de leurs armoires, et les dentelles de leurs fenêtres, qui avaient servi, jusqu’à aujourd’hui, sans s’abîmer, voici que, de Dunkerque à l’Alsace je les vois qui brûlent.
Brûler est un grand mot quand on observe de dix mille mètres, car, sur les villages, comme sur les forêts, il n’est rien qu’une fumée immobile, une sorte de gelée blanchâtre. Le feu n’est plus qu’une digestion secrète. A l’échelle des dix mille mètres le temps est comme ralenti, puisqu’il n’est plus de mouvement. Il n’est plus de flammes craquantes, de poutres qui éclatent, de tourbillons de fumée noire. Il n’est rien que ce lait grisâtre figé dans l’ambre.
Va-t-on guérir cette forêt ? Va-t-on guérir ce village ? Observé d’où je suis, le feu ronge avec la lenteur d’une maladie.
Ici encore il est beaucoup à dire. « Nous ne ferons pas d’économie de villages. » J’ai entendu le mot. Et le mot était nécessaire. Un village, au cours d’une guerre, n’est pas un nœud de traditions. Aux mains de l’ennemi il n’est plus qu’un nid à rats. Tout change de sens. Ainsi tels arbres, vieux de trois cents ans, abritaient votre vieille maison de famille. Mais ils gênent le champ de tir d’un lieutenant de vingt-deux ans. Il expédie donc une quinzaine d’hommes anéantir, chez vous, l’œuvre du temps. Il consomme, pour une action de dix minutes, trois cents années de patience et de soleil, trois cents années de religion de la maison, et de fiançailles sous les ombrages du parc. Vous lui dites :
Mes arbres !
Il ne vous entend pas. Il fait la guerre. Il a raison."
Extrait de « Pilote de guerre »
ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY
Avec Pilote de guerre, Antoine de Saint-Exupéry offre le témoignage bouleversant de la débâcle de juin 1940.
Avec pudeur et amour de l’homme et de son pays, Saint-Exupéry rend hommage à ceux qui ont sacrifié leur vie. Il signe le manifeste d’une France qui refuse la défaite. Il livre une œuvre de réflexion sur les fondements de la civilisation occidentale. Il croit à la victoire parce qu’il croit aux vertus d’une tradition spirituelle qui offre à chacun des raisons de croître, de se dépasser, de se sacrifier pour bâtir le monde.